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Oui, entrez, entrez, dans le « Blog » de « l’Incroyable Ignoble Infreequentable » ! Vous y découvrirez un univers parfaitement irréel, décrit par petites touches quotidiennes d’un nouvel art : le « pointillisme littéraire » sur Internet. Certes, pour être « I-Cube », il écrit dans un style vague, maîtrisant mal l’orthographe et les règles grammaticales. Son vocabulaire y est pauvre et ses pointes « d’esprit » parfaitement quelconques. Ses « convictions » y sont tout autant approximatives, changeantes… et sans intérêt : Il ne concoure à aucun prix littéraire, aucun éloge, aucune reconnaissance ! Soyez sûr que le monde qu’il évoque au fil des jours n’est que purement imaginaire. Les noms de lieu ou de bipède et autres « sobriquets éventuels » ne désignent absolument personne en particulier. Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie lactée (et autres galaxies) y est donc purement et totalement fortuite ! En guise d’avertissement à tous « les mauvais esprits » et autres grincheux, on peut affirmer, sans pouvoir se tromper aucunement, que tout rapprochement des personnages qui sont dépeints dans ce « blog », avec tel ou tel personnage réel ou ayant existé sur la planète « Terre », par exemple, ne peut qu’être hasardeux et ne saurait que dénoncer et démontrer la véritable intention de nuire de l’auteur de ce rapprochement ou mise en parallèle ! Ces « grincheux » là seront SEULS à en assumer l’éventuelle responsabilité devant leurs contemporains…

dimanche 17 mai 2015

Au nom du père (Chapitre XXII ; Tome I)

Les enquêtes de « Charlotte »

Avertissement : Vous l’aviez compris, ceci n’est qu’un roman, une fiction, une « pure construction intellectuelle », sortie tout droit de l’imaginaire de son auteur. 
Toute ressemblance avec des personnages, des lieux, des actions, des situations ayant existé ou existant par ailleurs dans la voie lactée (et autres galaxies), y compris sur la planète Terre, y est donc purement, totalement et parfaitement fortuite ! 
 
On ne parvient pas à régler les rampes d’admission du kérosène dans la chambre de combustion de du statoréacteur du Nivelle 001. 
Soit c’est trop puissant, soit c’est trop faible. C’est une question, à la fois de puissance des pompes d’admission, et de configuration des buses d’injection. 
Pour bien faire, il faudrait redessiner l’ensemble et ré-usiner les deux statoréacteurs : jamais ils seront près pour la mi-juillet qui pointe son nez dans peu de semaines. 
Le pilote d’essai, pressenti s’entraîne sur un simulateur de fortune et lui ne parvient pas à contrôler sa machine sous pilote automatique : il lui faudra faire tout le vol ou presque, notamment en faible altitude, « à la main ». Et à Mach 4, c’est vraiment casse-gueule. 
Ou reconfigurer le vol à haute altitude, là où l’ordinateur de bord peut reprendre la main sans risquer pour l’appareil et son pilote. 
 
Pendant ce temps-là, Rémarde laisse Shirley aux bons soins de Lydia quasiment enfermée dans l’espace clos autour de la maison de maître et de la piscine. 
Et l’anglaise de prendre son mal en patience devant les promesses répétées de la venue de Paul le lendemain…
Mais pourquoi tant d’assiduité à l’égard du patron ? 
Au bout de quelques jours, elle finit par lâcher à Lydia qu’elle a vraiment flashée sur l’allure de Paul. 
« Tu comprends, je ne sais pas si c’est l’homme de ma vie, mais je suis sûre que c’est lui qui doit me dépuceler. Je veux que ce soit lui ! Et personne d’autre… » 
Du coup, Paul sachant que les « pucelles », c’est ce qu’il y a de pire dans la vie d’un célibataire, il en avait fait l’expérience tout jeune avec une de ses « cousines », filles de « tante Jacqueline » au point qu’il avait dû convaincre la sœur d’y passer aussi pour remettre un peu de calme dans les esprits, ce que l’autre garce n’avait pas évidemment pas refusé tellement elle avait envie de faire chier sa sœur, il en a profité pour secouer un peu « DD » sur les origines de « Shirley, la tâche de rousseur ». 
On ne sait jamais. 
Et « DD » d’expliquer que Charlotte et Aurélie sont dans la nature, à la recherche des survivants de la centrale régionale pour femmes. 
 
La rencontre est pour la « chef matonne », devenue bretonne d’adoption passée la retraite, du côté de Redon, à Fégréac exactement. 
Pas facile à trouver son HLM de circonstance. Une femme empâtée, vieillie par l’alcool, mariée à un ex-gendarme passant ses journées à la pêche autour de l’étang Au Mée voisin. 
Pas facile non plus de lui faire fouiller dans sa mémoire. 
D’abord méfiante, elle accueille les visiteuses avec une certaine réticence. 
Puis celles-ci devenues plus précises sur le cas de la cliente de Jacques, elle s’est peu à peu détendue et commence à leur raconter des mi- mensonges, mi- vérités. 
 
Oui, à la centrale, il y avait des détenues privilégiées et d’autres non. Celles qui l’étaient, c’étaient celles qui restaient « consentantes ». 
« Et ça veut dire quoi ? Consentantes à quoi ? » 
À des séances avec Monsieur le directeur. « Oh, je ne peux pas en dire plus : je n’y ai jamais participé. Mais des bruits, des ragots, circulaient dans les couloirs, le réfectoire et les ateliers. » 
Et elle repart inlassablement sur le travail des ateliers où on y fabriquait des sacs de cuir pour des « belles dames », l’organisation des corvées, la routine, quoi. 
Quant aux « non-consentantes », elles faisaient du mitard plus qu’à leur tour, les corvées les plus dures et dégradantes, jusqu’à craquer. 
« On en retrouvait régulièrement à l’infirmerie, parfois après une TS, parfois avant. » 
L’administration pénitentiaire n’ayant pas les moyens, les personnels soignants venaient bénévolement de la clinique voisine. Celle d’un chirurgien réputé de la région. « On l’a vu plusieurs fois faire des consultations. Surtout pour les nouvelles. » 
Il venait aussi pour constater les décès, voire pour tenter de sauver quelques candidates au suicide, tout ça à l’œil : « Un bien bon docteur ! ». 
« Même si on n’en voyait pas souvent revenir, finalement, de ces désespérées-là… » 
Un métier épuisant, plein de compromis dégueulasses qui ne lui laissent pas un souvenir merveilleux. 
 
Mais c’était quoi ces « bruits » ? 
Elle finit par lâcher : « Vous n’êtes quand même pas tombées de la dernière pluie, les jeunettes ! Qu’est-ce que vous croyez que font les « bons bourgeois » des villes voisines quand ils ont le démon de midi chevillé dans le caleçon ? » 
Une prison proxénète ? Une maison clause bordélique ? 
« Je n’ai rien dit ! » s’enflamme-t-elle. 
Mais bon, certaines nuits, les vendredis, les consignes étaient de tourner le dos quand le directeur faisait sa tournée nocturne, trousseau de clé en main. 
« On entendait bien sa voiture filer à pas d’heure par la porte du personnel non gardée, il avait les clés. Et rentrer avant l’aube avec son chargement. » 
Les filles participaient à des « sorties » ? 
« Les consentantes seulement ! » 
Grand bien leur fasse : « Au moins, leur vie n’était, sinon pas plus douce, en tout cas moins dure. On en a vu qui sont même sorties plus tôt que la norme, que le juge d’application des peines, forcément, il restait partial, « attentif », nous disait-on. » 
Mais on sait aussi qu’une fois en liberté, elles n’en ont pas toute profité. « Beaucoup se sont suicidées dès après leur sortie : le choc de la liberté, celui de découvrir qu’elles n’avaient plus leur place dans leur famille, qu’on les avait oubliées, reniées ! C’est presque aussi dur que la prison, la liberté, quand on a fait une longue peine ! » 
Le seul qui en sait le plus, c’est le directeur de la prison de l’époque. 
 
Elles ont son nom et son adresse. Et son pedigree : une pointure. Elles se font confirmer qu’il s’agit bien du même et pas d’un homonyme : Marc Lacuistre.
Le bonhomme est issu de la pénitentiaire directement de l’école pour un poste de directeur adjoint d’une maison d’arrêt dans le Gard. 
Attention, il met à peine un an à avoir un poste de directeur à Villefranche-sur-Saône, puis file directeur de la centrale pour femme de Normandie, un établissement-modèle, spécialisée pour les peines longues pour femme, unique en France. 
« Il y reste 7 ans avant d’être nommé aux grâces à Paris » dira plus tard Charlotte à Paul. 
Ce qu’il y a d’extraordinaire, c’est qu’à partir de ce moment-là, il entame une carrière politique de proximité, puis ravit un siège de député à un socialiste avant de devenir sénateur de centre quelque-chose actuellement. 
« On l’a plusieurs fois vu candidat ministre, avec une préférence pour le portefeuille de la justice ou de la santé, mais à chaque remaniement ministériel, depuis 15 ans, il passe à côté. » 
Elle ne sait pas si elle va pouvoir l’interroger sur son passé. 
« En revanche, on a encore parlé de lui récemment pour être un candidat putatif à la prochaine présidentielle, même si ses chefs de parti l’ont finalement viré, pas vraiment confiance en lui, vu ses propos sur son blog. 
Mais aussi parce que du temps où il n’était que directeur en Normandie, il fréquentait tout le gotha local et que ses amitiés politiques l’ont un temps entraîné dans la mouvance mégrétiste du Front. 
Tu comprends, un type qui se dit pour la peine de mort, qui fait carrière de haut-fonctionnaire sous les socialistes, passe ensuite par le RPR pour atterrir chez des rad-soces quelconques où équivalent, ça fait plus que suspect aux yeux des « historiques » ! ». 
On fait comment alors ? 
« On fait qu’il a un blog que « DD » a visité. Et c’est plutôt saumâtre. Il est carrément pour l’abolition de la République, le retour au franc et des Bourbons sur le trône. Avec l’abolition complète des codes-napoléons en entier, un gouvernement fort et un retour aux valeurs éternelles de la France. 
Vois-tu où je veux en venir ? » fait-elle à Paul qui est un peu perdu… 
Pas du tout ! 
Comment un arriviste pareil peut-il espérer se présenter à la prochaine présidentielle sous la bannière « rad-soc » ou n’importe quelle autre ? 
On a vu pire, y compris la secte Moon. 
« Non décidément, tu me déçois. Relis donc l’annonce de la « liste des mille ». Je te lis : « Vous avez mis la nation et le peuple à genou. Tous à des degrés divers vous paierez pour vos crimes. Subiront le châtiment de Dieu tout puissant, à un moment ou à un autre, ceux désignés par le doigt de la justice divine, à savoir les personnes suivantes ». Tu comprends mieux, le chef, là ? »
Qui donc détient son pouvoir de Dieu à part le Pape et le sacré collège ? 
« Attends, chérie-chérie ! Tu ne penses donc quand même pas qu’on est face à un complot royaliste ? Faut savoir comment vivent ces gens-là : ils n’en ont plus rien à cirer de régler leurs comptes avec la gueuse depuis au moins l’arrivée de De Gaulle, voire même avant et la fin de l’épisode des croix de feu, je te signale ! 
On vit au IIIème millénaire, désormais, tu sais ! » 
Elle veut bien, mais tout de même. « Il y a des rapprochements étranges entre le texte et le contexte. 
D’abord ton père, puis ton frère qui se frottent tous les deux indirectement à ce personnage-là et à Risle… » 
« Risle et mon frère, d’accord. Mon père, on n’en sait rien ! » corrige Paul. 
« Oui mais Risle est lié de longue date à Lacuistre. Ils étaient voisins et je suis désolée, mais la mort de ton père me paraît tout d’un coup assez suspecte si par hasard il copinait aussi et forcément avec les gens de la pénitentiaire dans son palais de justice.
Et je te rappelle que c’est SA liste qui nous a mises sur la piste de cette prison, donc sur son directeur, et comme par hasard sur le bon docteur et voisin Risle ! 
Si tu ne sais plus additionner deux et deux, où va-t-on ? » 
Il faut reconnaître que tout ça est assez troublant, effectivement. 
 
« Et on peut aller plus loin : si deux et deux font bien quatre, quand tu rajoutes encore deux, ça fait six ! 
Or, que fait Risle sinon sa fortune internationale sur les greffes d’organe ? Et comment on se procure des organes ? Sur des cadavres, non ? 
Et où trouve-t-on des cadavres en bon état ? Tiens, comme par hasard du côté d’une prison pour nanas dont on sait, et c’est confirmée par la matonne-chef, que beaucoup font, ont fait ou feront des suicides, pendant ou après leur séjour. 
Ça va, tu suis l’arithmétique, jusque-là dans ta tête de matheux ? » 
On peut adhérer, on peut. 
« Car ça fait huit si tu rajoutes la chaîne de prostitution et la carrière fulgurante de notre ami Lacuistre. » 
Paul encaisse et rajoute : « Ça fait même 10 sur 10 quand tu entends les gusses s’expliquer sur le sort des faibles quand je suis allé en Écosse, quand les mêmes me cernent par le haut, ma candidature supposée à sa fondation, et par le bas, l’invitation de la fille de Risle à Montréal. Mais je ne vois toujours pas le rapport avec les morts de la liste des mille ! » 
« Moi non plus » entend-il dire dans le combiné de son portable entre deux coupures sur la ligne TGV. 
 
Mais on peut en imaginer plusieurs : « La première serait le fait d’un complot visant la forme républicaine du pays : il s’agit bien de « punir » les méchants et de restaurer un ordre nouveau. 
La seconde serait plus prosaïque et sordide, c’est-à-dire de se procurer des organes pour quelques clients privilégiés. Il faut que nous enquêtions sur les morts suspectes du doigt de Dieu, rien que pour savoir ce que sont devenus leurs organes. S’il y a un lien, faudra en aviser Scorff, où un autre. 
La troisième pourrait être liée à un plan plus vaste de mainmise de quelques potentats sur la culture des organes : je te rappelle que ton frère bossait sur les lois bioéthiques au Parlement de Strasbourg ! Quand même curieux pour un juriste pur que de s’intéresser par la bande à l’environnement juridique des affaires de sa belle-famille toute neuve. 
Et on gardera une quatrième, comme piste inconnue : on ne sait jamais. »
Pour la troisième hypothèse, après tout, c’est finalement normal : « D’autant que notre mère y travaillait comme fonctionnaire, exactement sur le même domaine pour être pharmacienne de formation ! » 
Elle en convient, mais elles arrivent à Nice et le tiennent au courant. 
 
De son côté, Paul est accueilli en fin d’après-midi à l’aéroport d’Aubenas par le couple hétéroclite et improbable Scorff/Trois-Dom : ils repartaient vers la capitale, s’étant cassé le nez à la porte de l’usine. 
« Bé qu’est-ce que vous faites-là ? » 
« Et vous ? On vous cherche partout depuis ce matin ! » 
C’est pour l’arrêter une nouvelle fois ? 
« Non pour vous entendre ensemble sur les circonstances de la mort suspecte de votre frère. Il y a des détails troublant… » commence la jolie juge Hélène qui, en ayant refait sa coiffure ressemble fort à la ministre de l’écologie. En plus smart et plus blonde quand même. 
Lesquels ? 
Il leur offre de faire une pause à la cafétéria en attendant d’être appelés pour l’embarquement de leur vol. 
Globalement, ils ont compris l’enchaînement des pannes et lui font savoir que l’épave de l’avion a été repérée par les autorités locales. Mais que ça prendra plusieurs jours pour la repêcher et encore plus pour l’expertiser. 
Quant à la dépouille, ça devient plus improbable : les courants ont pu la faire dériver sur un vaste périmètre. 
« Mais on ne comprend pas pourquoi vous aviez pris cet avion et pas celui avec lequel vous venez d’atterrir. »
Les gyroscopes déconnaient. Ils ont été changés depuis. « Et sans les gyros, on ne peut pas piloter en mode automatique, l’avion fait des embardées à n’importe quel moment, pensant corriger son cap et son altitude. C’est vraiment très inconfortable et épuisant. » 
Il leur faut revenir aux raisons du départ précipité de Jacques. 

Pourquoi ne s’est-il pas rendu chez la police, ou chez un juge, mais directement chez Paul, sans même en parler à sa femme. « Il a pourtant plein d’amis ! » 
« Parce que ça devenait urgent, que sa plainte n’a pas été traitée assez rapidement et que justement, moi je suis hors des circuits habituels de ses fréquentations. » 
« Par ailleurs », annonce Paul, « depuis j’ai fait de mon côté ma petite enquête dont se charge Charlotte. Vous connaissez, je crois ? » 
Elle est toujours dans le circuit, fait étonnée et presque ravie la juge, pendant que Scorff allonge un peu plus la tête… 
« Oui ! La « liste des mille » n’est pas vraiment une farce, même de mauvais goût. Je ne sais pas comment vous expliquer ça, déjà que les évidences passées, vous passiez dessus allègrement. Je n’espère pas vous convaincre, mais je me dois de vous rapporter les deux ou trois détails ahurissants qui ressortent de leurs investigations. » 
Lesquels ? Ils sont toutes ouïes ouvertes, se préparant à se bidonner franchement. 
« Non seulement la liste existe, mais les gars qui sont derrière la mettent en œuvre. Quand on gratte un peu, on tombe sur un sénateur dissident qui pourrait se préparer à un coup d’État, on ne sait pas encore ! » 
Toujours ces mystérieux complots ? 
Oui la liste existe et oui, on en est à trois morts en comptant Jacques, mais au moins deux qui meurent selon le même mode opératoire. 
« Des complots, j’en ai démêlé encore un il y a quelques mois : renseignez-vous ! Mais passons ! 
Car je ne sais pas encore quel crédit donner à cette information. 
En revanche, j’ai compris que ma famille, mais pas seulement mon frère, peut-être ma mère aussi et plus sûrement mon père, mais dans quelle mesure, je n’en sais encore rien exactement, serait mêlé de près ou de loin à cette histoire par des détours parfaitement improbables. 
Et finalement, c’est retombé sur la tronche de mon frangin. Dommage que ça ait précipité sa perte au lieu de le sauver : on aurait dû garder des contacts plus étroits et plus fréquents. Je m’en veux atrocement ! » 
« N’en rajoutez pas » énonce Scorff. 
Même pas à peine ! 

« Figurez-vous que j’ai d’autres chats à fouetter que de m’occuper des affaires des autres. Ici même, on prépare des prototypes qui feront date, et c’est bien plus important pour les intérêts de mon pays et les centaines d’emplois qui participent à faire vivre la région ! » 
Alors non, il n’en fait « même pas à peine ». 
« Entendu, entendu ! Pourquoi on ne peut pas visiter vos installations ? Je suis pourtant juge d’instruction et peux forcer n’importe quel lieu sur simple ordonnance ! » 
Ordonnances qui ne valent rien sur un site militaire, protégé par ses secrets. « Il aurait fallu que vous me laissiez-vous délivrer un laisser-passer. Pensez-y la prochaine fois. Parce que ça, je peux en prendre la responsabilité. » 
D’ailleurs, s’ils renoncent à leur avion du soir, il peut faire la visite immédiatement : « Vous y verrez une partie des « petits-secrets » de la République, à condition d’accepter de nier y avoir été à quiconque, même votre hiérarchie : c’est vous dire si moi je vous fais confiance, moi ! » 
Scorff n’est pas très chaud : « Germaine » l’attend pour dîner. Mais la juge volage est une curieuse par nature. 
Et Paul y voit une bonne façon de détourner un peu le poids du soupçon qui pèse sur ses épaules dans l’esprit de ces deux-là. 
 
Finalement, il laisse la moto pour un taxi, direction l’usine. La tête du gardien quand il ouvre à Paul escorté par les deux mêmes qu’il avait promptement éconduits ! 
« Monsieur Paul, vous souhaitez que j’appelle la gendarmerie, comme tout-à-l’heure ? » 
En fait, c’est carrément Scorff qui l’a faite venir en fin de matinée : les palabres avaient duré un bon moment avant de se terminer au restaurant contigu du poste de la ville. 
« Non, ça va aller ! Merci. Vous pouvez avertir Madame Nivelle que je passe chez elle avec deux invités qui resteront sans doute coucher. » 
Et se tournant vers la brochette parigote : « À moins que vous souhaitiez aller à l’hôtel avant de reprendre le premier vol du matin ? Je n’impose rien ! » 
Pour être honnête, il leur avoue qu’il aimerait bien leur tirer les vers du nez, sachant que l’intention reste la même pour ses visiteurs. 
« Voilà le clou, le petit-bijou que nous finissons de mettre au point : le « Isabelle », Nivelle 001. Un démonstrateur. »  
Et de présenter l’avion mono-corps, sans ses ailerons déployés, montés sur son train tricycle. Il en fait une brève description pour affirmer qu’en fait, « cet engin est uniquement développé pour tester ses céramiques.
Comprenez : vous avez vu l’atelier de concassage de poudres, celui de leur traitement chimique et de leur usinage. Ce sont des explosifs très puissants dont on maîtrise la combustion pour en faire des accélérateurs à poudre pour les missiles de nos armées. 
Bien ! Si on sait mélanger, broyer, laver et cuire nos poudres, nous sommes capables de faire la même chose pour en faire des céramiques réfractaires. Celles-là ont été testées à 2.500° C. 
En revanche, on ne sait pas grand-chose de leur comportement mécanique en mode réel d’usage, même si nous savons tout d’elles jusqu’à leur intimité et cristallisation en laboratoire. Il nous manque de les avoir testées à haute vitesse en atmosphère réelle sur leur support mécanique. 
Parce que l’innovation, ce ne sont pas elles-mêmes, mais le four que vous voyez là-bas, la fabrication des moules telle que chacune d’elle est un monobloc à encastrer dans les ailes et toutes les parties chaudes de l’avion à protéger. 
Si ça marche, on devrait pouvoir relancer le projet de navette Hermès pour lequel les américains avaient refusé l’accès aux licences de leur tuile de navette. Le projet en a été abandonné et depuis l’Europe se contente de spationautes assis sur un strapontin Russe ou Américain.
En fait, c’est l’usinage qui a péché, y compris chez les américains qui se contentent de tuiles de petites dimensions assemblées collées pour leur propre navette avec les conséquences que vous savez : ils en ont perdu deux à cause de ce genre de conneries.
Et autant d’équipages complets…  » 
Et  en plus, aucune tuile n’est semblable à sa voisine et à chaque fois, c’est un moule différent à fraiser dans un bloc d’acier qu’il faut faire. 
« Alors qu’avec notre procédé, le moule est en résine d’époxy, coulé autour de la matrice de la pièce en plâtre, et cuit de telle sorte que la céramique ressort d’un seul bloc. » 
C’était là la vraie nouveauté qui avait l’avantage de permettre des dimensions nettement plus importantes, en fait limitées par la taille du four lui-même. 
Impressionnant. Paul a pourtant l’impression de parler chinois. 
 
Mais le plus intéressant reste à venir, dans la vaste demeure de la Présidente, sur la colline, dès après l’apéritif de bienvenue.

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